Le Muguet
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Un des derniers textes de
Philippe, |
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Paris s'éveillait de la guerre, j'étais enfant. L'eau claire
lavait les roues des petites marchandes de quatre saisons contre
le caniveau. Une fraîcheur de Mai caressait les façades. La TSF
donnait Victoria Marino et sa voix exotique qui chantait
"Frénésie". Mon premier bonheur fou quand une petite vendeuse m'offrit ce premier brin, car elle avait mon age et je bondis de joie en courant sur la place jusqu'au boulanger proche. Oh ce muguet de rêves ! Jamais je ne saurais le mystère de son sens olfactif et étrange. |
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En début de printemps, ses longues
feuilles jaillissent du sol dans les bois telle une promesse qu'on
espère. Puis tout soudain le voilà dans la rue comme surgi de nulle
part et éclos comme un œuf dans sa fragrance folle. Passe-passe magique du jour. Demain il est fané. Offert comme un baiser dont on aspire le goût, le voici envolé dans son instant fugace. Pourtant cette présence dans le moment si vif de son passage au nez puis à l'imaginaire ! Comme il sait révulser l'âme en un tourne-coeur, laissant son sillage tendre poursuivre le cours des vies. Fée clochette, Peter Pan au parc de Kensigton Garden t'a prise pour une fleur ! Ta tige est un poison et des filles portent ton nom parfois. Ça fleure la midinette, la Lorette facile. Puis on te vend aussi en petite parfumerie, à prix économique. Ça fait peuple comme ta fête qui sent le défilé. |
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Les
mots de la chanson me reviennent parfois dans l'odeur du Métro tel
un vieux leitmotiv. "Aimer avec frénésie ..." Lors j'ignorais l'amour, mais le refrain berceur a traversé mon âge et en Mai je t'espère dans un creux du jardin où tu te multiplies, comme la vie ! Et je reste à genoux les yeux clos pour sentir mon enfance. La source - 2005
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