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Poèmes Personnels

 

 

 

Ginger palm
 Tiger balm
 O Tannenbaum !


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

   

C'était le temps des soleils noirs
ainsi la lune ciselait des coupes en plein
et des étoiles aussi lentes qu'Elle
y déposaient à l'aube ou des larmes ou des bribes
de mots
on s'exprimait en grappes de langues en bocaux de lèvres
des eaux de vie naissaient quand mouraient les silences
à la nuit la lumière inondait sa ligne d'existence
au creux d'un vallon de draps
moites
sa sueur m'était promise en nos suaires
Elle persistait son temps d'enfance

J'aligne une impudeur de Tartare sur la parallèle de sa géométrie femelle
arcs sous-tendus porteurs de rondes bosses et d'architraves
j'élève en l'écrasant une crypte byzantine à la gloire de son enfance
l'âcre eau de ses terreurs surnage ocre sur sa peau
Elle pleure

C'est ainsi que je l'ai connue
Elle rencontrée ailleurs
ailleurs ... un saint lieu
lundi jour de la lune
Elle vint en brin de verte lune en médaillon d'ivoire
toute pétrie d'herbe humide avec au bout des cils du sable
c'était comme un pommier planté en plein désert

Je l'aimai comme on sait les impossibles paysages
les fata morgana les aura les mirages
je l'exigeai de mots
je la tournai de verbe
ainsi que jarre pleine qu'on craint briser lourde d'un précieux liquide
où l'on voudrait tant boire

Entre deux volga de petite eau blanche
elle se laissa déchirer
labourer comme une terre
un soir
- en ces temps le soleil nous visitait à la nuit -
fille source femme fleuve
enfant mer

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  Elle touche du bout de doigts improbables
le corps des hommes comme volcans qui vont mordre

oh ! monseigneur de Nazareth qui savez le son des vingt quatre cloches des jours
protégez mon amour des heures qu'elle ne doit pas connaître !
délivrez la des rêves infertiles
épargnez lui les minutes inutiles
faites donc que les doigts qui devront la toucher
aient bien le goût du miel
et que le verbe enfin qu'on dira sur sa tête
n'ait que le doux relent de vos eucalyptus
pour le vin de Cendrars pour le sang de Peguy
pour la soif d'Omar
Khayyâm et puis le vent d'Artaud
le souffle de Nerval
les routes d'Hardellet
donnez lui monseigneur
- ne sommes nous pas cousins -
l'ongle de votre amour
quand je lui donne ma main

Dites donc à votre mère que je ne sais vénérer
mais qui fut dame enfin
dites lui qu'en cette nuit
je ne suis qu'un gamin
qui a peur
dites lui qu'en ces heures je veux les voir là
les hommes les virils à la voix male et chaude
ceux qui parlent des femmes devant les verres éteints
capitaines allumés de lumières humaines
devant les phares obscurs qu'ils ne voient qu'au matin
ceux qui sous-louent aux yeux la beauté faite de larmes
qui exhibent à l'encan l'immense rêve des gosses

On dirait de grands singes primates lorgnant
des petites filles
avec la caisse enregistreuse de la Banque Rothschild

Ma petite fille a un corps de soie
et des mots par intermittence
quand elle vous laisse pénétrer en son palais
ce sont des tentures ajourées qui perlent des syllabes
celles qui manquent au fil des mots au fil des heures
je les ai retrouvées dans ses profondes fibres
faites de sang de miel et de lait
ainsi qu'agnelle ouverte où je ne blesse pas
lascivement je l'ouvre peu à petit
c'est la plus belle pouliche du monde
j'intuitive les espaces cachés d'elle dans les méandres de ses genoux
au cœur des voyages en ses muscles cachés
j'y sais lire les mots qu'elle me cache
je les délivre de leur pesanteur en plein vol

J'ai crié des syllabes muettes tandis qu'elle m'arrachait mon souffle
- jamais enfant ne vous brise comme elle le fait -
je lui murmure qu'elle est enfant et elle le sait
elle est aussi plus que femme et ne le saura jamais

Ma petite fille est sur le chemin du Tout
et elle l'ignore
elle est prêtresse en son autel
elle doit régner
taisons nous de crainte qu'elle n'en est peur ...

En cette nuit je suis seul pour parler d'elle
j'ai faim de son ventre et de la montagne de ses mouvements

J'écris Toi avec le gout de Moi
Règne ...
ou bien demain ne sera pas !

1986