Ventre bombé qui va venir
c'est l'appel immédiat des machines à bruire
l'origine de tout le fluide sensible
descente en pente douce et l'homme est à genoux :
l'instant du choix ...
Là c'est la croupe ronde et presque toujours fraîche
sente mamelonnée qui conduit à l'enfer
on passe encore on glisse
le long des cuisses lisses
et l'on arrive à terre
qu'il faut prendre en ses mains pour oeuvrer
et la refaire la fille de chair !
Ce n'est qu'un corps friable pas plus haut que la main
il me faudra la cuire pour la rendre vivante
attente exacerbée de la transmutation :
mort ... transfiguration
toujours
ouvrir le four comme une crémation
et la saisir brûlante au creux de mes doigts gourds
Puis un homme viendra une femme peut-être
qui la prendra à tout jamais
et te paiera ta nourriture
pour que tu aies faim d'autres corps
Il ne me restera qu'un souvenir de chair
parcourue un instant
et de ses quelques mots d'alors :
- vos mains sont douces !
Étrange voyage de ses modèles
merveilleux paysages
jusqu'à celui d'un pauvre hôtel
ou d'un triste hôpital
- couverts du toit des circonflexes -
où poser enfin ses bagages
Quelle sera la dernière image ?
- terre vive ou fille morte -
C'est un hôtel-garni-restaurant-café-bar
au bout du quai d'un port :
un bateau devrait en partir ...
Je suis le seul client
la serveuse est si belle
elle va desservir
mon repas est fini
ou j'ai déjà dîné
Je vois la rampe de l'escalier qui conduit à ma chambre
l'horloge sur le mur qui marque la minuit
et la nappe salie
-Encore un doigt de vin ?
-Non monsieur c'est fini
mais j'aime son sourire
Il faut bien se lever ...
je voudrais pourtant voir
le visage penché de l'homme derrière le bar
il semble si las
et je dois le payer
et il lève la tête :
étrange c'est la mienne
Serai-je quitte ?
il semble me dire oui
la serveuse est montée
m'attend-elle dans mon lit ?
il fait non de la tête
Que faire en attendant ...
un dessin sur la nappe
un corps en mie de pain
mais pour quoi faire ?
J'entends dans le lointain
les roues d'une charrette
c'est ici qu'elle s'arrête
- Allons monsieur il est temps !
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